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Publié : 11 février 2013

Mali : la France en guerre ?

Le 13 janvier dernier, le Président de la République décidait de l’intervention de l’Armée Française au Mali... Cela signifie-t-il que notre pays "entre en guerre" ? Le mot n’est pas prononcé*... D’ailleurs la France n’est "attaquée" par aucun pays ! Alors d’où vient que le mot vient si spontanément à l’esprit ? Dans quelle "guerre" les français sont-ils donc embarqués ? D’autant que "les intérêts fondamentaux de la France ne sont pas en cause » ? a déclaré le Président de la République.

Après trois semaines d’intervention au Mali, la première mission : mettre les forces criminelles en déroute, serait accomplie. Mais gagner une bataille n’est pas gagner la guerre ! Les groupes fondamentalistes, de plus en plus implantés sur ce territoire depuis la chute de Khadafi (grâce à l’OTAN il est important de le souligner), sont des fanatiques très organisés qui ont une longue expérience de la guérilla. Ils ont une connaissance parfaite du terrain qui leur est favorable et leur offre de multiples lieux de repli, de même que dans les pays voisins.

Cette intervention durera "le temps qu’il faudra" a déclaré F. Hollande, ajoutant (il faudra) "rester au Mali jusqu’à ce qu’il y ait des autorités légitimes, un processus électoral et plus de terroristes"... Bigre ! Cet immense pays (14,5 millions d’habitants sur un territoire de 1 200 000 km2) est dans une situation très instable depuis des années, extrêmement fragilisé, il faut bien le dire, par des décennies d"’ajustements structurels" imposés par le FMI. La mise en place d’un processus électoral pour restaurer un pouvoir légitime, pour être moins « militaire » n’est pas pour autant une mission moins délicate ! De tels objectifs sont pour le moins évasifs et les moyens mis en œuvre pour les accompagner encore plus. Enfin, quel serait le coût pour la France de ces moyens mis en œuvre alors que « l’Etat est endetté » ne cesse-t-on de répéter, et qu’un régime d’austérité est demandé aux français ?**

Mais est-ce bien le rôle d’une grande puissance de restaurer un pouvoir légitime dans un pays en difficulté ? Comment, après les chutes de S Hussein et Khadafi orchestrées par "les grandes puissances" (mais sans l’accord de l’ONU), et les conséquences que l’on sait des régimes qui leur ont succédés, et du chaos dans lequel ils ont plongé, comment continuer à penser que cela puisse être la bonne solution pour aider des pays en difficulté ? Ne serait-ce pas plutôt parce que, au contraire des déclarations de F. Hollande, "des intérêts fondamentaux" sont en cause ?! Et de s’interroger sur les raisons pour lesquelles l’intervention de la France est perçue de manière si positive par "la communauté internationale", présente aussi au Mali, aux côtés des armées africaines*** pour "combattre le terrorisme", surtout lorsqu’on connaît le potentiel de richesses minières de ce pays : uranium, or, pétrole...

Si la présence française devait perdurer au Mali, elle ne serait rien d’autre que ce qu’il faut bien avoir le courage d’appeler par son nom : une néo-colonisation afin de préserver ses intérêts sur cette région ; avec la même politique d’exploitation et de dévastation sur le terrain dans des conditions tellement inhumaines que ce sont elles qui font le lit du fondamentalisme.

Il serait très dangereux de faire l’impasse sur ces questions alors que les politiques libérales menées en Afrique depuis des décennies nous rattrapent en Europe, et de s’interroger sur la "vraie" guerre à mener. Contre le terrorisme ? Assurément. Mais aussi contre le rouleau compresseur des politiques libérales. Le Front de gauche s’y attelle.

PS... Sans oublier que, pendant que notre armée "va sauver" le Mali, des maliens sans papiers sont expulsés « manu-militari »... Sont-ce bien réellement les intérêts des maliens qui sont défendus par notre gouvernement ?...

* il fut un temps où l’on parlait d’ "évènements" en Algérie... Le mot guerre ne fut prononcé que 40 ans plus tard.

** à ce jour 3 millions d’euros par jour pour la France et la Cedeao a demandé une aide internationale de 950 millions de dollars, qui sont à ce jour loin d’être rassemblés . G.L