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Publié : 28 novembre 2013

LES JOURS HEUREUX

Un film vient de sortir en salle au beau titre de « Les jours heureux ». A la fin de la projection on ne peut qu’être saisi de stupéfaction quand c’est la première fois, comme c’est mon cas, qu’on entend que cette expression est le nom qui a été donné au programme du Conseil National de la Résistance, un programme élaboré et adopté à l’unanimité dans la clandestinité en pleine guerre mondiale.

Un aspect aussi heureux de la seconde guerre mondiale n’aurait-il pas dû être mis en avant dans un cursus scolaire ? Etre un peu plus présent dans les médias ? Heureusement des artistes sont là et il faut remercier Gilles Perret de son initiative car « il était temps » que ce film sorte pour que les derniers initiateurs vivants de ce Programme soient enfin entendus du grand public.

Les principes de ce programme vont constituer les fondements du pacte social français de l’après-guerre, celui des « Trente glorieuses ». Toutes les décisions qui seront prises dans les années qui suivent la Libération, s’en inspireront : création d’un système de Sécurité sociale, démocratisation de la vie des entreprises, édification d’un véritable service public, nationalisation de l’énergie et des transports, de la Banque de France et du crédit, planification de l’économie, indépendance de la presse à l’égard des puissances d’argent, reconnaissance du droit au travail et au repos, du droit à l’instruction et à la retraite, rétablissement des libertés publiques et syndicales…

Cette « utopie » des jours heureux est née d’une volonté de se libérer de l’occupant mais aussi d’une volonté d’instaurer « une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières ». Programme évidemment insupportable pour ces « féodalités économiques et financières » d’avant guerre ! Mais leur collaboration avec l’occupant les mettait du côté des vaincus. Elles ont donc bien été obligées de se mettre en sourdine... Mais, leur désir d’en découdre avec ce programme insupportablement égalitaire va bien vite refaire surface.

En 2007, quelques années après l’élection de N. Sarkozy, une éminence grise du Medef, Denis Kessler écrit, en parlant des annonces successives des différentes réformes du gouvernement : « on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux... il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945 et de défaire méthodiquement le programme du Conseil National de la Résistance ».

En 2013, un an et demi après l’élection de F. Hollande et du parti socialiste majoritaire, malgré les espoirs qu’on fait naître une majorité « de gauche » à la tête du pays, cette déconstruction « méthodique » ne semble pas être stoppée bien au contraire : les « réformes » prises satisfont toujours le Medef alors qu’une politique d’austérité est de plus en plus cruelle pour le peuple : réduction des budgets pour la Sécurité Sociale, régression des conditions de retraite, services publics laminés (santé, transports, enseignement, justice, administration...), industrie bradée à des sociétés privées qui engrangent des profits, licencient les salariés puis fuient à l’étranger après avoir profité des subventions, cadeaux fiscaux faits aux grandes entreprises et aux plus riches, non contrôle d’une évasion fiscale de plus en plus débridée tandis qu’augmente la TVA qui touche principalement les foyers les plus modestes, droit du travail remis en cause (ANI), dérégulation financière qui étouffe l’économie, presse et médias aux mains des « féodalités financières », tout comme dans les années 30...

Alors n’y aurait-il pas urgence à « résister » aujourd’hui ? La France n’a pas aujourd’hui à se défendre d’un occupant. Mais « l’ennemi » est pourtant là, renforcé même par la mondialisation, prêt à tout, y compris le dérèglement climatique de la planète pour la seule accumulation de l’argent... A-t-on le droit pour les générations qui nous suivent, de « laisser filer » ainsi ce que ces hommes courageux ont construit, alors qu’ils étaient eux-mêmes dans des conditions si difficiles ?

Le 1 er décembre c’est un peuple résistant, avec un programme au nom tout aussi heureux que celui du CNR : l’Humain d’abord , qui manifestera à Paris son désir de retrouver les valeurs de la République et réclamera devant le ministère des Finances une juste répartition des impôts. Il exigera que l’écot du citoyen serve à un service public équitable et non à la destruction méthodique, pour le seul profit de quelques uns, de celui qu’ont pensé et mis en place les Hommes de la Résistance,

G. Largillier